Les candidatures en vue de la présidentielle au Gabon prévue en Août 2016 se multiplient. Et l’ancien Premier Ministre, Casimir Oyé Mba fait partie des prétendants au fauteuil présidentiel. Il est reçu dans ce nouveau numéro de L’INTERVIEW.
Africa24: Vous serez toujours candidat si la candidature du Président Ali Bongo Ondimba n’est pas invalidée ?
Casimir Oyé Mba: C’est une question qui doit être examinée par mon parti et par tous les partis qui, je l’espère, appuieront ma candidature. Je suis dans une démarche de parti…
Mais vous avez votre mot à dire…
Lorsque le problème se posera au sein de mon parti, je donnerais, comme je le fais toujours, mon avis.
Vous l’avez forcément déjà anticipé cette situation, en fin stratège politique ?
Je suis membre d’un parti politique. Ce parti politique doit examiner cette question, prendre une décision. Ce que je peux vous dire, c’est que quelque soit la décision que prendra mon parti, fidèle à mon engagement dans ce parti - je rappelle que je suis l’un des membres fondateurs de ce parti - je suivrais ce que mon parti décidera.
Certains de vos proches affirment que vous prévoyez de lancer éventuellement un appel au peuple en vue d’un soulèvement populaire si cette candidature est validée…
Mais non ! Mais de quoi vous parlez ? Je ne suis pas un pyromane ! Moi, rien dans mon parcours antérieur ne peut laisser penser que je suis un destructeur, un casseur, quelqu’un qui brûle…Donc c’est le pouvoir qui, pour nous noircir, laisse traîner ces vétilles là sur nous, à savoir nous sommes des pyromanes, nous sommes des gens violents, nous sommes des xénophobes etc. Tout ça, c’est des trucs complètement éculés.
En 2009, vous affirmiez être le vrai candidat du consensus, sept ans plus tard, quel type de candidat êtes-vous ?
Je suis toujours le même. La différence essentielle, je viens à l’instant de l’évoquer, c’est qu’en 2009, j’étais dans le cadre d’une démarche indépendante parce que je n’avais pas de parti, j’avais quitté le Parti Démocratique Gabonais auquel j’appartenais jusque-là. En 2010, j’ai participé à la formation, avec d’autres, d’un parti politique qui s’appelle l’Union Nationale et qui joue un rôle dans la vie politique gabonaise. C’est ce parti qui a décidé de me faire le porte-étendard dans cette bataille des présidentielles qui s’annoncent. Je précise au passage que j’ai été choisi par mon parti dans le cadre d’une primaire. C’est la première fois dans l’histoire politique de notre pays que ce type de procédure est utilisé…
Mais vos détracteurs affirment que vous n’aviez pas réellement en face de vous des adversaires dignes de ce nom qui auraient pu faire pencher la balance.
Ça c’est eux qui le disent ! Toujours est-il que dans aucun parti politique au Gabon, ni de la majorité, ni de l’opposition, il n’y a eu, jusqu’ici de primaire. Après c’est facile de dire qu’en face, il n’y avait personne. Tous les militants de l’Union Nationale avaient le droit de se présenter, tous ! Il y a trois d’entre eux qui ont décidé d’être candidats, moi et deux autres, tous les autres pouvaient le faire.
Donc un bel exemple de démocratie…
Absolument, je l’affirme !
Vos détracteurs affirment aussi que votre parti a moins de poids depuis la disparition d’André Mba Obame…
Non, notre parti joue le même rôle qu’avant. D’ailleurs, Monsieur Mba Obame, qui est l’un des membres fondateurs éminents de notre parti est souvent présenté comme étant le Président de notre parti. Monsieur Mba Obame n’a jamais été Président de notre parti. Mais il jouait un rôle important, ça je le souligne. D’autres aussi jouaient des rôles importants, mais enfin, ce n’est pas ça le sujet…
Donc le parti a toujours autant de poids qu’il y a quelques années…
Je pense que oui ! En tout cas, nous y travaillons.
En 2009, un certain nombre de gabonais ont milité pour vous, ont cru en vous. Pensez-vous que ces mêmes gabonais vont encore une fois vous soutenir après le désistement qui a eu lieu juste avant l’élection présidentielle passée ?
Je le souhaite et je pense le mériter…
Le mériter ?
Oui ! Mais, parce que les raisons pour lesquelles en 2009, beaucoup de gabonais pensaient que je pouvais être l’homme de la situation, l’homme du changement, les qualités que j’étais supposé avoir à ce moment-là, elles sont en moi…
Ils ont découvert d’autres facettes de votre personnalité aussi…
Non, ils ont découvert que, prenant en compte les éléments de la situation que je ne connaissais pas, que je ne maîtrisais pas au début, j’ai décidé de me retirer de la course en 2009. Je me suis expliqué 10, 15 fois là-dessus, donc je crois que ce n’est pas la peine d’y revenir sur vos antennes. Je me suis expliqué une dizaine de fois là-dessus, à l’occasion de diverses interventions devant les médias au Gabon. Donc, les gabonais savent ce qui s’est passé…
Permettez à nos téléspectateurs de se faire eux-aussi leur propre opinion…
J’ai causé à ceux qui croyaient en moi, une très grande déception, je suis conscient de cela, qui est, à la mesure, sans doute, des espoirs qu’ils plaçaient en moi. Donc, je suis conscient que probablement à ce moment-là, j’ai dû commettre une erreur. Je leur demande de considérer que c’était une erreur et de me la pardonner. Mais ce que je dis aux gabonais aujourd’hui, c’est que nous sommes en 2016. Ce qui s’est passé en 2009, que ça se soit bien passé ou que ça se soit mal passé, malheureusement 2009, c’est passé.
Si vous avez cédé face à la pression en 2009, qu’est-ce qui prouve…
Non, je n’ai pas cédé à la pression ! Ça c’est votre présentation de la chose. J’ai pris en compte les éléments d’informations sur la situation du Gabon, je les ai analysés tels que je les ai reçus, à partir d’informations que m’ont donné deux ou trois personnalités. Vous appelez cela de la pression, c’est votre liberté de l’appeler ainsi, moi j’appelle ça des informations qui m’ont été données et j’ai décidé, à partir de ce moment-là, de prendre la décision que j’ai prise.
Donc, vous avez été influencé…
J’ai été informé !
Informé, donc influencé…
Parce que vous, dans votre vie, tout ce que vous faites, vous ne tenez pas compte de ce qu’on peut vous dire ici et là…
Est-ce que ce n’est pas un trait de caractère qui n’est pas forcément dans l’imaginaire collectif propre à celui d’un dirigeant ?
Est-ce que vous pouvez vous souvenir aussi, que dans les années 90, alors que je n’avais aucune expérience politique, j’ai été appelé par le Président Oumar Bongo, pour être Premier Ministre du Gabon à un moment qui était au moins aussi délicat que celui que nous vivons aujourd’hui ? J’ai fait ce travail pendant quatre ans et demi, et depuis que je suis parti de la primature, vous êtes certainement très renseigné, très honnêtement, je n’ai pas entendu que les gabonais ont considéré que j’avais été la honte de mon pays. Alors, maintenant que j’ai acquis un peu plus d’expériences, pourquoi voulez-vous me faire croire que je serais devenu plus minable que je ne l’étais il y a 10 ans ? Si les gabonais me font confiance, je suis en mesure de tenir notre pays, de porter son destin. En tout cas, je suis certain d’une chose : je ne peux pas faire pire que tel autre…
Et vous êtes donc certain que vous n’allez pas, cette fois-ci, décevoir ceux qui comptent voter pour vous, qui militent pour vous actuellement ?
Je suis de foi catholique, même si le Pape, pour lequel j’ai du respect, venait de Rome, pour me dire telle ou telle chose, je lui répondrais, “je fais ce que j’ai envie de faire, c’est-à-dire aller jusqu’au bout”. J’irai jusqu’au bout !
Sauf si votre parti vous demande de ne pas le faire…
Oui, bien sûr !
Au sein de l’opposition, certains vous reprochent de ne pas être un vrai opposant, de ne pas avoir un discours assez dur, assez tranché et tranchant d’ailleurs, vis-à-vis du Président Ali Bongo Ondimba, exceptée cette question liée à la Constitution. Que leur répondez-vous ?
J’ai fait plusieurs déclarations au nom de l’Union Nationale. J’ai accepté plusieurs interviews de plusieurs journaux gabonais. Je dénonce la gestion de Monsieur Bongo !
Oui, mais ce qu’ils vous reprochent, c’est de ne pas la dénoncer avec autant de ferveur que d’autres la font, d’autres candidats à l’élection présidentielle par exemple…
Ferveur ? Je ne note pas plus de ferveur…
Vous êtes un opposant modéré…
Non, je suis un homme modéré. Je ne suis pas un homme d’excès, ça, je le reconnais. Mais mon discours est connu : j’estime que Monsieur Ali Bongo, n’est pas à sa place à la Présidence de la République. C’est pour ça que je me suis présenté contre lui en 2009. Déjà, en 2009, tout le monde ne s’est pas présenté contre lui…
Vous n’avez pas été candidat au final ! Vous vous êtes désisté…
D’accord, mais j’ai présenté ma candidature contre quelqu’un qui s’appelle Ali Bongo. J’affirme ici, à l’attention de tous les gabonais et des gens qui nous suivent, que je considère qu’il serait préférable que Monsieur Bongo sorte de la Présidence de la République gabonaise, parce que sa gestion des affaires est inadéquate et calamiteuse et que ça risque de conduire mon pays dans des situations qui pourraient devenir incontrôlables et dans lesquelles nous perdrions tous !
> La première partie ici